Raymond Domenech a publié le 21 novembre « Tout seul » - le bien nommé !
Il y décrit les symptômes de son échec, mais sans aller jusqu’au bout de son analyse par défaut de grille de lecture des événements.
Raymond aurait pu utiliser notre grille Monde. Elle dit pourquoi il s’est planté, elle dit aussi ce qu’il aurait dû faire pour réussir.
Pourquoi s’est-il planté ?
1/Première erreur, il n’a pas clairement « dit » son Monde voulu.
Il ne l’a pas dit aux joueurs qu’il sélectionnait, il ne l’a pas dit aux médias, il ne l’a pas dit au 60 millions d’entraîneurs-adjoints que nous sommes.
C’est d’autant plus dommage qu’on sent qu’il en avait un : un Monde où qualités individuelles et esprit d’équipe sont totalement intégrés, où les qualités individuelles ne suffisent donc pas pour faire partie de l’équipe, un Monde du clan dans lequel le chef est l’entraîneur et qui éliminera tout joueur qui refuse le collectif.
2/Deuxième erreur, il n’a pas créé de passerelles pour faire rentrer ses joueurs dans son Monde à lui.
La passerelle pour réussir ce passage est pourtant simple dans ce métier du football : la sélection, avec sa version encore plus visible : l’exclusion de la sélection.
Domenech n’a pas utilisé cette passerelle, il a retenu et fait jouer des joueurs qui n’avaient pas cet esprit d’équipe et qui le revendiquaient. Pourquoi diable n’a-t-il pas utilisé la méthode Aimé Jacquet qui, lui, avait su montrer que son Monde voulu n’était pas négociable en ne retenant ni Ginola ni Cantona, pourtant les meilleurs joueurs individuels français de l’époque.
2/Troisième erreur, il a rendu illisible son Monde voulu
a) Un pas en arrière sur son Monde voulu en ne retenant pas Gourcuff - « Je me suis rendu compte qu'inconsciemment, beaucoup de joueurs ne lui faisaient pas la passe lorsqu'il était le mieux placé. Le «sortir» du groupe, c'était un moindre mal. Sinon, il fallait virer 4 ou 5 joueurs. J'ai été sévère avec lui mais c'est parce que c'est un mec super, cultivé, avec le sens du collectif. Il n'avait rien à faire dans ce contexte difficile ». Sic.
b) Un pas en avant vers son Monde voulu en virant Anelka qui l’avait tutoyé « Ce tutoiement, c'est l'effondrement d'un monde. Je suis en pleine détresse. Choqué ».
c) Encore un pas en arrière « pourquoi n’ai-je pas écarté certains ? Mais parce qu'ils étaient les meilleurs joueurs du moment ! La valeur du joueur est aussi importante que l'état d'esprit. On ne gagne pas un Mondial avec des joueurs qui n'ont «que» le bon état d'esprit. Et puis, on a toujours l'espoir que ça va marcher »
Qu’aurait-il dû faire pour réussir ?
Raymond Domenech a choisi les individualités, les talents, et n’a pas su créer un Monde pour les fédérer… et gagner la Coupe du Monde. Pourtant, chacun en rêvait.
Nous rêvons tous de « performance », quel que soit le sens que nous donnions à ce mot. Elle n’est possible collectivement que si un Monde partagé permet de réaliser un projet, d’exécuter une stratégie. Cela demande de formaliser ensemble les modes de pensée et les principes de fonctionnement qui permettront l’action collective performante.
Qu’aurait pu faire Raymond Domenech pour cela ?
1. Ne pas « espérer que ça va marcher ! » sic
2. Faire émerger le Monde voulu qui aurait permis la performance collective
3. Faire émerger des « passerelles » entre son Monde et celui de ses joueurs pour fonctionner ensemble
4. Et dans tous les cas : faire appel à P-Val !
Laissons Raymond conclure : « Là, j'ai raté quelque chose dans le rapport humain ».
Mais osons lui répondre « Raymond, ce n’est pas le rapport humain que vous avez loupé, ce sont les fondamentaux de la stratégie et du leadership ».
François Varin
votre article est très intéressant mais semble s'appuyer d'un postulat de base: Domenech avait un Monde voulu.
RépondreSupprimermais est ce réellement le cas? auriez vous un exemple d'entraineur qui a réussi à créer un Monde voulu? comment décrypteriez vous le Monde voulu de Jacquet? et j'ajouterai: le poste d'entraineur de foot permet-il de déployer un Monde voulu? sachant qu'un entraineur reste en moyenne 1 an et 4 mois à la tête d'une équipe?